Le cadre est le terrain de jeu par excellence du photographe, c’est pourquoi lui seul peut décider d’inclure ou d’exclure des éléments de ce cadre. Cette sélection permet de mettre en valeur le sujet ou le message véhiculé par l’image.
Le photographe est le seul à maitriser la présence des éléments regroupés dans la limite que forme le cadre… Car c’est bien ce dont il s’agit : le cadre représente la limite physique de l’image. Au-delà, les éléments hors cadre sont invisibles… et donc ils n’existent pas. Ainsi, le choix des éléments présents dans le cadre doit être réalisé avec rigueur.
J’ai décidé de traiter en deux articles distincts les notion d’inclusion et d’exclusion du cadre. Vous retrouverez donc la semaine prochaine l’approche consistant à exclure du cadre les éléments inutiles.
Le cadrage, première étape pour inclure
Cadrer, c’est choisir. Une image, en photographie, découle de nombreux choix réalisés successivement afin d’arriver à un résultat final, en adéquation avec les attentes du photographe.
Les premières décisions qu’il aura à prendre concernent :
- le format de l’image : au format « standard » (qui est généralement de 3:2), de nombreux autres formats s’ajoutent (exemple, 1:1 pour un format carré)
- l’orientation de l’image : verticale ou horizontale
- le plan par rapport au sujet : gros plan, plan large…
Déjà en fonction de ces premiers choix, le photographe a une idée de ce qu’il veut faire entrer dans le cadre et de quelle manière il souhaite positionner son sujet dans l’image.
Le cadrage est la première clé pour sortir des photos banales. Il laisse déjà une grande latitude de choix, reflets de l’intention du photographe.
La composition, inclure dans le cadre
La composition consiste à organiser dans le cadre les différents éléments qui compose l’image. Il y a là indéniablement un travail d’inclusion. Chaque élément a fait l’objet d’un choix réfléchi et assumé par le photographe pour son utilité avérée.
Les lecteurs de cet article ont également consulté : « 7 choix capitaux en photographie ».
Ce travail de composition s’organise le plus souvent autour du sujet de l’image. Une fois celui-ci défini, les éléments retenus pour l’accompagner dans le cadre doivent le servir. C’est-à-dire que chaque élément a une légitimité à être dans le cadre parce qu’il aide le spectateur à mieux saisir le sujet. Chaque élément du cadre a un rôle à jouer pour la compréhension de l’image.
Les règles de composition sont nombreuses, même si la plus connues et répandue dans l’esprit des photographes débutants est celle de la règle des tiers. Elles ont pour but de guider le photographe dans ses choix. Or si vous suivez ce blog avec assiduité, vous savez déjà que je vous encourage à enfreindre ces règles lorsque votre créativité débordante vous le permet ! 😉
Le regard dans le cadre
Le regard du spectateur circule dans le cadre afin d’appréhender pleinement l’image. Il explore progressivement l’image en suivant certains critères bien réels, même si le spectateur n’en est pas forcément conscient. Son regard ne divague pas dans le cadre au hasard, son cheminement s’avère très précis.
Les éléments retenus par le photographe pour constituer l’image jouent un rôle important, appuyés par les choix de composition, et quelques unes de ses règles.
Il faut se rappeler de certaines notions aptes à diriger le regard dans l’image. L’œil est capté par certains éléments :
- les lignes directrice permettent de faire voyager le regard au sein de l’image
- les tâches claires ou lumineuses attirent le regard
- les zones aux contrastes forts captent le regard
- les formes humaines ou animales suscitent l’intérêt du regard
C’est la richesse de ses éléments qui donnent une force à l’image, une émotion…
Le regard ne doit pas être entravé par des éléments inutiles, au risque d’embrouiller le spectateur et de rendre l’image confuse. Le regard doit être fluide. Il doit se poser sur des éléments nécessaires à la compréhension de l’image et glisser jusqu’au suivant.
Le recadrage
Le post-traitement
La photographie est le seul art de l’image qui peut subir un recadrage (impossible, par exemple, pour le cinéma).
Le post-traitement est un passage obligé pour la photographie ; ne serait-ce que pour développer le format RAW de la prise de vue en format image lisible et immédiatement accessible. Et le recadrage est l’ultime possibilité pour le photographe de modifier le cadrage initial.
Bien sûr, il est toujours plus intéressant de procéder à un cadrage correct dès la prise de vue. Un recadrage s’accompagne souvent d’une perte en qualité de l’image. C’est pourquoi s’assurer d’avoir fait des choix pertinents avant d’appuyer sur le déclencheur est toujours la meilleure option…
Les lecteurs de cet article ont également consulté : « 5 questions à se poser avant d’appuyer sur le déclencheur ».
Le recadrage permet de mettre l’accent sur les éléments importants en modifiant leur place dans le cadre.
La qualité du recadrage va dépendre de la juste analyse qui est faite de l’image, des éléments qui la composent et des points d’attraction qui captent le regard et l’attention du spectateur.
Le recadrage vise à simplifier l’interprétation de l’image, son sujet, son histoire. Ceci en incluant uniquement le sujet et les éléments secondaires qui apportent de la valeur ajoutée à l’ensemble.
Le recadrage selon Albert Plécy
Albert Plécy (1914-1977) est un journaliste, photographe, cinéaste et peintre français, spécialiste du langage de l’image.
Afin de procéder à un recadrage efficace, il préconisait de « diviser l’image en petits carreaux et de donner à chacun une valeur d’attraction ou de répulsion afin de trouver un cadre qui englobe les éléments pertinents, et élimine ceux qui transmettent une information parasite, qu’on peut à défaut retoucher« .
Exercice pratique de recadrage
Je vous propose de procéder à un petit exercice tout simple de recadrage. En prenant en compte les notions vues jusqu’ici dans cet article, recadrez quelques unes de vos anciennes photos, en post-traitement ou carrément à l’aide d’une paire de ciseaux 😉
Inclure l’essentiel dans le cadre
Choisir ce qui entre dans les limites du cadre dépend uniquement de l’intention du photographe quant à son sujet et les éléments secondaires indispensables qui l’accompagnent. Il fait le choix de ce qu’il veut montrer. Il définit ainsi sa vision.
Le cadre, en tant que bordure physique infranchissable, limite l’image dans ce qui lui est essentiel. C’est ainsi qu’elle devient lisible et compréhensible.
Une image qui déborde de détails sans importance pour sa compréhension perd sa substance. Cette dernière est dissoute dans un amalgame confus.
Si l’abondance d’informations vous perturbe en tant que photographe, si vous pensez que tous les éléments ont leur importance et que le choix semble impossible, peut-être est-il temps de voir si la scène ne mériterait pas plutôt plusieurs clichés… Il peut être judicieux de découper la scène. Au lieu de faire une photo « brouillon« , faites plusieurs photos avec chacune un sujet propre accompagné d’éléments complémentaires qui lui sont essentiels.