Ansel Adams est le photographe de l’ouest américain du XXème siècle. Ces images en noir et blanc sont autant d’odes à la nature. Il porte un regard bienveillant sur les immensités et splendeurs du parc Yosemite, en particulier.
Ansel Adams est l’un de mes photographes préférés même si je ne suis pas une spécialiste du paysage dans ma pratique photographique. Sa vision écologiste me fait un peu penser à celle de Sebastião Salgado avec son exposition Genesis (que j’ai eu la chance de voir lors de son dernier passage à Lyon en 2020). L’un et l’autre rendent compte des beautés naturelles.
L’oeuvre de Ansel Adams me plait parce qu’il a une manière toute particulière de traiter son travail en noir & blanc : des contrastes forts et affirmés associés à la technique du zone system qu’il a lui-même développé.

Qui est Ansel Adams ?
Les débuts
Il nait le 20 février 1902 en Californie. Celle-ci restera toute sa vie durant son terrain de jeu photographique préféré. Il y décède en 1984.
C’est à 14 ans qu’il commence la photographie dans la vallée du Yosemite où il reviendra chaque année (jusqu’à s’y installer plus tard avec sa femme). Il utilise alors un appareil photo simple et bon marché : le n°1 Box Brownie de Kodak. Cet appareil est composé d’un boitier en carton. A sa sortie, en 1900, il est vendu au prix de 1$.
La vision du photographe
En 1932, il crée avec Edward Weston et Imogen Cunningham, ses amis photographes de San Francisco, le Groupe f/64. Ce dernier leur permet de promouvoir leur vision de la pratique de la photographie. F/64 est la plus petite ouverture de diaphragme d’un appareil photo grand format (celui-là même qu’il utilise pour ses photos de paysages). Ce réglage permet une profondeur de champ maximale. Ainsi, la photographie est très nette du premier plan à l’arrière plan. Et la netteté est la priorité d’Ansel Adams.
La nature est son bureau. Et plus spécialement la Sierra Nevada.

En 1933, il expose pour la première fois dans une galerie.
A la fin des années 30, il participe activement au développement de la technique du zone system. Cette dernière vise à planifier l’exposition avec un traitement particulier en chambre noire (masquage, maquillage ou dodging & burning).
Il recevra plusieurs prix et récompenses pour son travail. Et plusieurs prix photographiques portent désormais son nom.
La photographie pure
La vision de Ansel Adams donne toute son importance à la photographie pure. Celle-ci privilégie la lumière et la netteté. Le photographe utilise des appareils photos grand format qui permettent une résolution maximale.
« Seules les images fortement saisies ont la faculté de pénétrer profondément dans la mémoire, d’y rester, de devenir, en somme inoubliables. C’est pour moi le seul critère d’une bonne photographie »
Ansel Adams
Il s’éloigne radicalement du courant qui prime à cette époque : la photographie liée à la peinture et un un flou esthétique radicalement opposé à sa propre vision.
Le zone system de Ansel Adams
Pourquoi la nécessité du zone system s’impose-t-elle à Ansel Adams ?
Afin de sublimer sa vision de la photographie, Ansel Adams va inventer puis perfectionner, en collaboration avec le photographe Fred Archer, la technique du zone system.
Il s’agit d’une technique qui permet de définir l’exposition correcte ainsi que le contraste adéquat au moment du développement du tirage. En procédant par un traitement par zone, chacune indépendamment des autres, le photographe obtient alors un rendu photographique proche de la réalité. Ceci est le souhait premier du photographe qui veut retranscrire avec ses images les immensités et la richesses (en lumières et contrastes) des lieux.
Cette technique lui permet, en quelque sorte, de palier à l’inconvénient de la surface plane d’une image. Elle participe à la vision du photographe en insufflant de la profondeur, de la force et du volume à l’image. Elle est la réponse à son intention photographique.
Comment fonctionne le zone system ?
Il s’agit d’une sorte de codification que Ansel Adams applique à l’image. Elle est alors découpée par zones en fonction des écarts de contraste présents.
Chaque zone porte un numéro en rapport avec sa couleur dominante. La zone 0 correspond au noir absolu et la zone 10 au blanc le plus pur. Au milieu de ces deux extrêmes se trouve la zone 5, représentée par un gris moyen.
Chaque numéro caractérise une profondeur de gris : plus ou moins. Ces annotations permettent de travailler sur chacune de ses zones lors du développement afin d’obtenir le meilleur résultat final.
Le travail en chambre noire revient à masquer certaines zones afin de mettre sous la lumière les parties non cachées. Une grande partie du traitement relève du dodging & burning dont Ansel Adams a largement usé. Tout se passe au moment où le papier photographique est exposé. Il reçoit d’abord une exposition normale. Ensuite, une exposition supplémentaire est nécessaire sur la ou les zones qui doivent être assombries. Une feuille épaisse et opaque, la main ou un objet est maintenu entre l’objectif de l’agrandisseur et le papier photographique. Cela permet à la lumière de tomber uniquement sur la partie de la scène à assombrir.
Ansel Adams est un perfectionniste qui apporte autant de précision et de rigueur à son travail, sur la profondeur de champ, la lumière, la netteté (grâce à un appareil photo 4×5), au moment de la prise de vues qu’à celui du développement du tirage final.
Cette prise en charge globale et minutieuse de l’acte photographique rend le travail d’Ansel Adams très qualitatif. Elle en fait surtout un travail très reconnaissable parmi tous.
Le zone system concrètement
Je vous propose de retrouvez ci-dessous la classification et la numérotation des zones répertoriées et utilisées par Ansels Adams. Tout est parfaitement codifier.

Et voici une approche concrète du zone system pour bien comprendre son fonctionnement et son application.

L’oeuvre d’Ansels Adams
Son oeuvre est gigantesque et connue dans le monde entier. Gigantesque et pourtant amputée… Il subira dans les années 30, me semble-t-il, un regrettable incendie dans son studio photographique. Il perdra 1/3 de ses négatifs, à jamais perdus. Un véritable drame pour un photographe.
Si son oeuvre touche émotionnellement autant de personnes, je crois que c’est parce qu’elle revêt une force incroyable. La netteté est son obsession. Et celle-ci rompt avec ce qui pouvait se faire auparavant.
Je suis pour ma part très sensible aux photographies en noir & blanc très contrastées. Je ne pouvais donc que tomber sous le charme d’un travail si abouti.